Une porte à New York – Focus 12

En octobre 1989 Antoni Clavé passe une dizaine de jours à New York non pas pour une exposition mais pour le plaisir : pour regarder, prendre des photos, filmer, voir. Ce voyage est une inspiration. À son retour, il créée une série de toiles qui seront regroupées sous le titre « Vu à New York ».

De New York, Clavé a vu la matière rugueuse des murs, leurs affiches publicitaires, parfois lacérées, démultipliées, la colle dégoulinante, les signes des graffitis. Les fragments urbains observés par Clavé sont recomposés (rassemblés) dans son atelier. Ils lui offrent un renouvellement de sa peinture et une liberté fabuleuse. Pierre Cabanne parle de « l’espace corporel et spirituel que Clavé donne à voir. New York est devenu un fragment de peinture que l’artiste s’approprie. Nous savons, depuis le Pop art et le Nouveau Réalisme, que la nature moderne est un tableau ».

Dans un quartier pauvre de New York, la porte vitrée d’une vieille maison, à côté d’un mur tapissé d’affiches, l’avait frappé. Il en a trouvé une, presque identique, dans un chantier naval près de son atelier et a recréé la juxtaposition ancrée dans sa mémoire de la porte et du mur. Clavé a toujours préféré l’état brut à la séduction du beau. La porte est vieille, rouillée, sale. Le panneau qui fait office de mur est recouvert d’affiches newyorkaises, de pages de journaux américains et moucheté de grandes dégoulinures rouges et bleues, rehaussées de graffitis à la bombe noire. La toile est impressionnante par sa monumentalité, par son intensité et sa violence picturale. Clavé l’achève en févier 1990.

Proche du street art, des œuvres de Jean-Michel Basquiat, la série « Vu à New York » est elle le portrait d’une ville ? Plus que jamais, il est question d’une réflexion sur le réel et de sa représentation fragmentaire.