Antoni Clavé à Vence

Dans le cadre de « Picasso Méditerranée 2017-2019 », le musée de Vence présente tout l’été, et jusqu’au 28 octobre, une exposition proposant une approche inédite de l’influence de Picasso. C’est un véritable dialogue entre les sculptures du Maître réalisées dans les années 50 et 60 (prêt du musée national Picasso Paris) et des œuvres de treize artistes d’aujourd’hui qui est proposé au public. Ces objets « bricolés » de Picasso témoignent d’une intuition directement traduite dans les matériaux simples et banals. L’économie de moyens contraste avec la ferveur de l’expression et l’inventivité́ du jeu entre les lignes et les formes, entre le plein et le vide. Ces œuvres occupent le centre des sept salles d’exposition auxquelles répondent les créations d’artistes de générations, d’obédience et de goûts différents.  Ainsi en premier lieu Antoni Clavé, dont la rencontre avec Picasso a été déterminante.

Vue de l’exposition « Picasso et les contemporains – Éloge de la fabrique » 23 juin – 28 octobre 2018, Musée de Vence (06)

Cinq œuvres de Clavé sont présentées : trois « Instruments étranges » – Instrument en carton, Instrument muet et Étrange instrument (1962-1976) – et deux sculptures, Masque au cageot (1963) et On dirait un guerrier (1985). Les « Instruments » appartiennent par leur nature, à la sculpture de Clavé. Passé maître dans l’art de l’assemblage, il affectionne l’accumulation de matières variées et la transformation des objets délaissés qui ont fait le bonheur de son illustre prédécesseur. Bouts de cartons, de bois, armature de tiroir, planches, ficelles, agrafes et clous forment trois improbables instruments à corde dont nul ne saurait obtenir un son. Clavé est un poète, il joue avec les matériaux pauvres, les détourne pour mieux les réhabiliter. Masque au cageot (1963) est une sculpture plus traditionnelle puisque c’est une fonte en bronze. Il s’agit là encore d’un assemblage. Un masque de plâtre rond, aplati, presque lunaire, est posé dans une petite cagette qui lui sert d’écrin, elle-même posée de manière oblongue dans une grosse cagette à barrettes déformée par le poids des légumes qu’elle contenait ou par le temps passé entreposée dans un coin de l’atelier. Un œil est clos, l’autre évidé. On dirait un guerrier (1985) présente un personnage hiératique en bronze. Deux morceaux de bois, une vieille serpillère déchirée, des fils de fer et quelques clous composent ce piètre soldat. Le guerrier est une figure récurrente dans l’œuvre de Clavé. Il apparaît en peinture en 1958 et en sculpture en 1960. Les premières œuvres sculptées sur ce thème étaient de petites dimensions puis elles ont gagné au fil du temps en monumentalité, jusqu’à atteindre 3,80 m en 1991.

« Étrange instrument », 1962-76 Bois, carton, toile et ficelle, 62 x 50 x 12 cm

 Vous pourrez également (re)découvrir des œuvres de Louis Cane (1943), Anne Deguelle (1943), Pierre Tilman (1944), Max Charvolen (1946), Gérard Serée (1949), Joël Desbouiges (1950), Gérald Thupinier (1950), Phil Billen (1954), Miquel Barcelo (1957), Vincent Corpet (1958), Thierry Cauwet (1958), Fabrice Hyber (1961) qui démontrent chacun à leur façon combien la leçon de Picasso a non seulement été fructueuse mais reste ouverte, suspendue à la primauté de son impulsion souveraine.