Antoni Clavé à la Bibliothèque nationale de France

L’exposition proposée par la Bibliothèque nationale de France offre un panorama de l’œuvre gravé d’Antoni Clavé à travers une cinquantaine d’œuvres de 1955 à 1995. Lithographies, eaux- fortes, aquatintes, gravures au carborundum, gaufrages, collages et kraft lithographié permettent d’appréhender quarante ans d’un parcours d’une grande richesse technique et stylistique.

Bouteilles, 1969 ; Eau-forte, aquatinte en couleurs et gaufrage

Après une brève expérience en Espagne, Antoni Clavé commence à pratiquer véritablement la lithographie en 1939 dans l’atelier d’Edmond Desjobert qui fut l’imprimeur de Picasso, Maillol, André Lhote ou encore Zao Wou-Ki, Maurice Estève et Jean Dubuffet. De facture classique, ses premières lithographies sont mises au service de la narration et de l’illustration.
Lors d’un séjour à Barcelone en 1965, Antoni Clavé s’initie à l’aquatinte et à l’eau-forte. Il délaisse la lithographie au profit de la taille-douce. Il grave sur cuivre, sur zinc. Il aménage un atelier dédié exclusivement à l’estampe. La pratique de la gravure lui permet de s’adonner à de multiples expérimentations plastiques.

 

Instrument étrange, 1979 ; Plaque de gravure

La découverte en 1968 de la gravure au carborundum, récemment mise au point par le peintre-graveur Henri Goetz, est pour lui une révélation. L’ajout de matières et le gaufrage viennent enrichir son répertoire iconographique et correspondent parfaitement à sa démarche artisanale et expérimentale. Grâce à ces techniques, il explore d’autres matériaux et crée une multitude d’estampes rivalisant d’ingéniosité. Il s’amuse à associer toutes sortes de matériaux à ses eaux- fortes et aquatintes : tissus, cartons, bois, coupures de journaux, cordes, clefs, et plus tard clous, punaises, vis, trombones et agrafes. Le support devient même chez lui œuvre d’art à part entière : deux plaques de gravures sont présentées au public.

L’exposition présente des œuvres hommages aux grands maîtres du « panthéon » de Clavé : le Gréco, Rembrandt, Goya, Dürer. Elle permet de redécouvrir l’art de Clavé, profondément ancré dans la tradition espagnole (bodegón / natures mortes) et également dans son siècle d’expérimentateurs tels Morandi (géométrisation et fabrication artisanale des couleurs), Miró avec qui il a partagé, entre autres, la pratique de la gravure au carborundum ou encore Brassaï (le graffiti comme langage).

Une partie de l’exposition est consacrée aux Instruments étranges, un ensemble de gravures au carborundum créées en 1980. Antoni Clavé célèbre ici la musique, qui l’a toujours inspiré, et plus particulièrement les instruments à cordes et à vent. Papiers déchirés, gaufré, perforés et superposés, cordes, ficelles, agrafes, punaises et fils de nylon, clavé utilise ici l’assemblage, l’adhérence des motifs et des matières dans le carborundum et permet à ses gravures de dépasser la stricte bi-dimensionnalité.

La Gloire des rois, 1976 ; Gravure au carborundum et gaufrage

Quelques planches de livres de bibliophilie complètent la présentation de la BnF : Gargantua (1955) qui renouvela durablement l’iconographie du peintre – rois et reine firent le succès de Clavé, La Gloire des Rois (1976) qui ouvrit la voie aux fameux « papiers froissés » ou encore la gravure pour Poèmes pour après (1989) qui témoigne de l’amitié profonde avec Pierre Seghers.

ANTONI CLAVÉ – ESTAMPES
9 janvier – 25 février 2018
BnF – Site François Mitterrand, Paris